|
||||||||||||||||||||||||||
![]()
l'auteur
voir aussi
|
Liu Lihong - Améliorations
Ce texte a été écrit pour la présentation de l'exposition "Homesick", qui présente des images de la ville de Shenyang, où vit l'auteur.
Le "Réel" est un phénomène intérieur, on ne peut pas le penser en terme de vérité ou d'erreur, son sens est complètement relatif à la façon d'"être", à un moment donné, d'un individu. Mon "réel" personnel est une matière extraite suivant ce processus et ma façon d'"être" peut à certain moment se présenter comme une chose intéressante voire extraordinaire. Mon rapport au réel ressemble à une promenade ou un voyage à la recherche de quelque chose. Les découvertes et les trouvailles ouvrent souvent des possibilités nouvelles, certaines me donnent simplement l'amitié et je souris. C'est une route pleine d'espoir et de surprises imprévisibles. Pour moi le réel n'est pas si différent que cela du "surréalisme". Quoique les deux termes puissent apparaître contraires, ils sont bien plus proches qu'on pourrait le penser. Le réel est toujours plus étonnant et plus étrange que le surréalisme. Les choses qui me frappent le plus se cachent toujours juste autour et peuvent se présenter à tous moments. Dans mon activité de photographe et de peintre, la découverte et l'analyse ont la plus grande importance. Chaque fois que je prends une photographie, elle dépend en fait d'une intention minutieuse.
L'appareil photographique peut enregistrer des choses que l'œil ne voit pas. Le simple fait de capturer tous les éléments visuels présents devant l'objectif et de les ramener à un plan unique crée une image qui implique le spectateur. La façon de "forcer" à "collecter" ces éléments visuels initiaux est à la disposition du photographe. Ceci est une sensation ; je la collecte, je l'accumule avec d'autres et j'essaye de l'enregistrer sur le film. En plus d'être une façon intéressante d'enregistrer un instant de temps particulier, la photographie est aussi un outil de maintien de la structure du temps. Je mets cela en rapport avec mon intérêt profond pour le cinéma. L'image animée est façonnée à partir d'un cadre unique dans un ordre donné. Même si on retire une image de cet ordre, elle conserve encore un sens qui vient du moment de sa capture. Le "Pseudo-temps" : c'est un mot que j'aime bien. Pour moi c'est le temps du mirage ou de l'illusion. Je doute souvent que des choses qui me sont arrivées se soient réellement produites. Quand je m'interroge sur ces choses et les photographies qui les accompagnent, le fait d'avoir enregistré le fait met en question ma propre existence. Les photographies, qui à l'origine documentaient les moments en question à un moment donné et avec un niveau donné de vérité, peuvent tout aussi bien devenir des phénomènes irréels et quelque chose d'imaginaire. Ce que cette incertitude apporte n'est pas un sentiment, mais une attitude face au réel. Tous les moments idéaux et les bonnes choses qui nous arrivent ont tendance à présenter une durée de vie plus courte. La photographie dans son aspect "présentation de mémoire" ou "faiseur de mémoire" peut avoir sa place dans ces courts moments idéaux et peut leur donner une chance d'avoir été réalisés ou pas. Chacun s'interroge sur lui-même, mais le résultat de l'introspection n'est pas sous contrôle.
Pendant toutes ces années de photographie, j'ai été très contemplatif. Ce genre d'approche finit par devenir une approche mentale de soi-même. Après avoir pas mal photographié j'ai commencé à comprendre certains aspects de mon travail. J'ai réalisé qu'il ne me serait d'aucun secours de tenter de déterminer ce qui allait résulter en fait du travail lui-même. Je voulais parvenir à voir clairement la direction dans laquelle mon travail m'entraînait. La série "Time Story" n'est qu'une évolution de ce processus. Et bientôt je commençais à trouver un certain charme à cette approche. Quelle que puisse être la précision de mes attentes, le résultat était toujours très surprenant. En 2006, j'ai fait la série "Garden". C'est un travail complètement différent, mais on peut comprendre son origine dès les premiers mots de "Powder Carmine" et de "Time Story". Si on regarde ces travaux par ordre chronologique, on verra qu'ils constituent une entité. Shenyang, la ville représentée dans l'exposition '"Homesick" a son caractère. L'arrière-plan industriel fait de l'ombre à presque toutes les tentatives municipales de développement. Ce combat inégal est à la fois unique et raisonnablement absurde. Une "cité industrielle" signifie bien trop, et les accommodements de sens qu'on peut tenter apparaissent quelque peu grossiers et triviaux ; ce genre précis de contraste m'attire énormément.
Quand je parcours mon travail passé, je trouve que mon style a beaucoup changé, mais en réalité la perspective est devenue de plus en plus claire. Les éléments enfouis montent peu à peu à la surface. Mon emploi de professeur de photographie m'a donné de bonnes aptitudes à l'expérimentation de toutes sortes d'idées. Celle qui reste toujours est que la photographie, plus que le résultat d'un procédé technique ou d'une création artistique, est avant tout le résultat d'une expérience humaine.
voir aussi dernière modification de cet article : 2008
|
|||||||||||||||||||||||||
|