Bertrand Hugues,
photographe du végétal
©bertrand hugues
Dans une interview ancienne
sur galerie-photo datant de 2002,
vous présentiez votre travail à la chambre 4x5" sur les végétaux.
18 ans ont passé. Vous travaillez toujours des images à partir des
végétaux. Qu'est-ce qui a changé, qu'est-ce qui n'a pas changé ?
Si mon sujet n’a pas changé, ma façon d’aborder le
végétal a évolué. Une troisième dimension s’est imposée petit à
petit et une certaine affinité pour l’illustration « surréaliste »
m’a fait entreprendre des compostions plus abouties. Je ne me voyais
pas aborder la couleur sans cette étape.
©bertrand hugues
Dans une exposition à venir très bientôt, vous
présentez des tirages au procédé Fresson. Pourquoi ce choix ?
Le choix du procédé Fresson pour ma prochaine
exposition à la galerie Eric Mouchet « Seconde Nature » (du 6
novembre au 5 décembre) émane d’une proposition d’Eric Mouchet.
Après avoir vu mes premiers tirages Fresson quadrichromes en 2017 il
m’a proposé de travailler à partir des motifs primitifs des
céramiques de Jacques Blin (1920-1995). Les patines, les tons nacrés
et pastels des œuvres de Blin dialoguent incroyablement avec la
palette pictorialiste du procédé Fresson. Ce fut donc comme une
évidence.
Qu'est-ce aujourd'hui pour vous qu'une belle image
?
Je ne suis pas un artiste militant. Si une œuvre
me plait elle touche à ma sensibilité.
Je crois à l’émotion qui se dégage d’une création, à l’harmonie et à
la beauté pour ce qu’elles nous apportent.
©bertrand hugues
Comment avec-vous vécu le basculement de
l'argentique au numérique ?
Je ne suis pas pro-argentique mais la chambre
photographique, le film 4x5 inch, le tirage baryté ou le procédé
Fresson correspondent à mon rythme de travail et au recul nécessaire
dans ma façon de travailler. Le numérique peut parfois intervenir
mais uniquement avant le tirage. J’effectue alors un scan du
négatif pour faire une simulation des masques au laboratoire mais
cela reste exceptionnel. Et puis il y a une pérennité que je dois à
mes collectionneurs. C’est aussi une des raisons qui m’ont rapproché
de l’Atelier Fresson.
©bertrand hugues
Est-ce que vous diriez que, globalement, l'image
photographique a changé ?
Ce que l’on en a fait a changé. Je ne suis pas le
mieux placé pour en parler puisque j’utilise plus encore
qu’auparavant la photographie pour immortaliser une composition et
ce avec le même procédé qu’il y a vingt ans.
Mais quand on regarde les filtres utilisés pour diffuser des images
sur les réseaux sociaux on voit qu'on imite souvent des procédés anciens (cyanotypes,
virages, sténopé, etc..). La photographie reste donc empreinte d’une
certaine nostalgie.
©bertrand hugues
Dans l'exposition vous présentez vos images en
rapport avec des photographies de céramiques. Quelle est la
nécessité de cette association ?
Il s’agit plus d’une expérience que d’une
nécessité. D’une opportunité même devrais-je dire.
L’image qui en découle résulte d’une approche différente. On ne part
pas de rien ou d’éléments glanés au hasard lors d’une collecte à la
campagne. Vous êtes confronté à un motif à partir duquel il faut
développer une recherche. Pour certaines images j’ai employé la cire
végétale afin de créer des formes biomorphiques dans mes
compositions. J’ai également eu recours à des colorants pour
d’autres images où l’élément liquide est présent. Toutes ces
interventions viennent de recherches effectuées lors de mes
précédentes séries en noir et blanc. Une sorte « d’art appliqué » en
quelque sorte où l’on puise dans sa bibliothèque pour penser à
transformer l’existant.
Vous êtes maintenant un photographe aguerri ;
quels conseils donneriez-vous à un jeune photographe ?
Celui que Denise Colomb m’a donné quand je lui ai
écrit il y a trente ans :
« Cher jeune collègue, vous êtes jeune et votre œil doit s’exercer.
Allez voir les grands maîtres, travaillez, trompez-vous et trouvez
votre voie ».
©bertrand hugues
|