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Le photographe

  

Thierry Girard

Né le 19 juin 1951 à Nantes
 Diplômé de Sciences Po Paris en 1974
puis Photographe
www.thierrygirard.com
thierry(at)thierrygirard.com

blog : http://wordspics.wordpress.com
blog :http://actuthg.wordpress.com/
facebook : http://fr-fr.facebook.com/
Thierry.Girard.photographe
 

 

Interviewé par

  

Jean Desmaison



né en 1948 en Limousin
Passionné de photographie
et de musique
depuis l'âge de 8 ans

Auteur-réalisateur vidéo
10 place Manigne
87000 LIMOGES

05 55 34 80 21
06 70 96 73 20
www.jeandesmaison.com
clip(at)jeandesmaison.com
 

 

Thierry Girard :
vers le grand format
en photographie
 

Thierry Girard, quand et comment-êtes vous venu à la photographie ?

J’ai fait des études dites “sérieuses“ (Sciences PO à Paris), tout en m’intéressant par ailleurs beaucoup à la littérature, au théâtre, au cinéma. Je rêvais d’un métier créatif, sans être tout à fait sûr d’y parvenir. A défaut, je me voyais bien travailler comme journaliste, ou dans l’édition… Et puis la photographie, pour laquelle j’avais un peu d’intérêt, mais pas plus, est vraiment entrée par effraction dans mon univers lorsque j’ai découvert à travers des portfolios et des livres les œuvres de photographes qui me semblaient radicalement différentes de tout ce que j’avais vu jusqu’alors. C’était au début des années 70, à une époque où il y avait encore très peu d’expositions d’auteur, très peu de livres publiés, et où le goût moyen se forgeait autour des photographes “élus“ et réélus mois après mois par le magazine Photo… Et bien sûr, internet n’existait pas (faut-il le rappeler aux plus jeunes ?). Et je dois beaucoup aussi à mes séjours londoniens, car c’est là où j’ai vu ma première grande expo photo, une rétrospective de Paul Strand ; là où j’ai acheté la revue Creative camera qui m’a fait découvrir Robert Frank, et là où j’ai retrouvé, dans les quartiers où j’ai vécu, notamment dans l’East End, des scènes, des situations, une atmosphère un peu sombre et brumeuse qui évoquait sans la parenthèse du temps l’œuvre de Bill Brandt, le Robert Frank d’avant Les Américains, ou les photos de repérage prises par Alain Resnais pour un film qui ne s’est jamais fait.

 


Thierry Girard © - Observatoire Photographique des Vosges du Nord, 2010

 

 

Là, c’est votre initiation en quelque sorte à la photographie, mais de là à en faire un métier…

Après, c’est un peu le hasard. A la sortie de Sciences Po, un an de service militaire obligatoire et au retour, un vrai malaise, une redoutable incertitude par rapport à mon avenir : ce sont encore de vraies années de rébellion, et si je ne milite nulle part, je n’ai pas envie pour autant de rentrer dans le “système“. Alors, l’envie me prend de m’exercer à la photographie en arpentant justement les rues de Londres, et je découvre immédiatement l’attrait qu’exerce sur moi ce medium, juste en marchant, sans autre but que de saisir ce qu’on appelait à l’époque des snapshots (on parle plutôt aujourd’hui de street photography). De retour à Paris, je fais quelques tirages, je les mets dans une boîte que je montre à quelques personnes, tout le monde m’encourage, et je me dis « Pourquoi pas ? ».

 

Quelles ont été les œuvres majeures de votre parcours?

C’est difficile de répondre à cette question, car plus de trente années consacrées à la photographie, ça veut dire beaucoup de projets, beaucoup de travaux aboutis, beaucoup d’expositions, beaucoup de livres… Sachant que, très tôt, j’ai décidé d’être en quelque sorte un précurseur dans la façon de gérer mon “métier“, l’économie de mon métier, en privilégiant mes travaux personnels par rapport à un exercice strictement professionnel de la photographie dans le monde de la presse, de la publicité ou de la mode… Ce qui semble naturel aux jeunes photographes qui sortent aujourd’hui des écoles d’art ne l’était pas à l’époque, et ça n’a pas forcément été bien vu par la profession, qu’il s’agisse des autres photographes ou de ceux qui les faisaient travailler, mais ça, c’est une autre histoire… Alors, pour en revenir aux œuvres majeures, je parlerai plutôt de moments ou d’œuvres décisives : Far-Westhoek, un travail que j’ai fait autour de Dunkerque en 1982, première résidence d’artiste, première exposition, premier livre… Frontières en 1984, le premier projet conçu vraiment autour de la problématique de l’itinéraire et la mise en place d’une vraie méthode de travail… Et, pour faire bref, parce que des projets décisifs il y en a eu beaucoup, je sauterai à 1997 avec la Route du Tôkaidô et la présence affirmé et définitive de la couleur avec un retour à une photographie plus documentaire après plusieurs années consacrées à une approche plus métaphorique et poétique du paysage. Et pour vous faire plaisir, je citerai aussi Paysages insoumis, un projet initié en 2007, qui est mon premier travail réalisé intégralement à la chambre 4x5…

 


Thierry Girard © - Paysages insoumis, 2007

 

 

Mais, si nous parlons des livres, j’ai un faible pour La Ligne de partage, publié en 1988 ; pour un autre magnifique travail d’impression qui est le livre publié sur Saint-Pierre et Miquelon en 1995, sans oublier D’une mer l’autre en 2002 qui compte beaucoup parce que c’est aussi un livre où je fais une large part au travail d’écriture. Et parmi les plus récents, j’aime beaucoup l’esprit et la maquette d’Un Hiver d’0ise ainsi que le tout dernier Arcadia revisitée, un très bel ouvrage réalisé avec un budget serré, comme quoi, c’est possible…

 


Thierry Girard © - Arcadia revisitée, 2011

 

 

Qu'est-ce qui vous différencie globalement des autres photographes ?

Euh… Rien ! Je ne sais pas. Ce n’est pas à moi, ni de me poser la question, ni d’essayer d’y répondre. Je ne cherche pas à me distinguer, je cherche à être moi. Ceci dit, comme je l’ai déjà évoqué, je me suis distingué au départ de ma carrière dans ma manière de procéder. Aujourd’hui, les projets d’auteur, les recherches de financements et de subventions, les relations privilégiées, établies avec “l’institution culturelle“ au sens large ou les collectivités, c’est devenu monnaie courante. Peut-être même trop courant… Quand à l’esprit de mon travail, ce qui est somme toute le plus important, je me sens d’abord l’héritier d’une tradition photographique qui est celle de la photographie documentaire américaine, et j’espère avoir contribué à apporter ma petite pierre à l’édifice (et ce n’est pas terminé !). Par ailleurs, je constate que j’ai pas mal d’enfants : des légitimes, ceux qui revendiquent leur filiation (et il peut il y avoir plusieurs papas ou mamans !) ; et des illégitimes, ceux qui ne me connaissent pas ou ceux qui font semblant de ne pas me connaître… Mais, je pense qu’il y a dans ma petite chanson quelque chose qui reste singulier et qui n’appartient qu’à moi. Je me souviens de la réflexion d’un de mes éditeurs. Je lui avais envoyé un carton de vernissage et il m’avait dit après : « Quand j’ai vu la photo, j’ai su que c’était toi… Ça ne pouvait être que du Girard ! ». Il y a aujourd’hui pléthore de photographes qui pratiquent la photographie documentaire au risque de la répétition et de la saturation. Cela oblige sans cesse, sinon à se remettre en question, du moins à effectuer un travail critique vis-à-vis de son propre travail et vis-à-vis du travail des autres. Dès que l’on se contente d’exploiter son savoir-faire, d’aller dans le sens du vent dominant, ou de ne répondre qu’à l’image, souvent étroite, que les autres se font de vous, on assure sans doute sa réussite sociale et financière, mais on est mort artistiquement !

 

 

Avec quel matériel travaillez-vous et pourquoi?

Ma véritable entrée en photographie a été l’acquisition de mes deux premiers Leica en 1976. J’aimais l’objet (comment ne pas l’aimer ?), et surtout c’était l’outil de mes maîtres d’alors, Robert Frank ou Lee Friedlander, sans oublier évidemment Cartier-Bresson. Il en est résulté une incapacité voire une détestation à utiliser tout système reflex, ce qui m’a amen��, lorsque j’ai voulu changer de format, à privilégier des 6x7 à visée télémétrique comme le Makina Plaubel ou plus tard le Mamiya 7.

 

 

Alors, la chambre ! Pourquoi ? Comment ?

Au milieu des années 80, j’avais rencontré Joel Meyerowitz dans son studio à New York et il m’avait assuré en souriant qu’on pouvait photographier aussi vite à la chambre 20x25 qu’au Leica ! C’était un peu par provocation, mais aussi une façon de me faire comprendre que lorsqu’on pratique une photographie de type documentaire en extérieur, comme celle que nous partagions, il n’y a pas besoin de faire des réglages très compliqués et qu’avec un peu d’habitude, on peut se caler très rapidement. J’ai été tenté alors d’acheter une chambre à New York, et je ne l’ai pas fait ! J’ai sans doute eu tort ! Je pense que par rapport au travail que j’ai réalisé pendant ce long séjour aux Etats-Unis, mes photographies y auraient sans doute encore gagné de la force, ou de la présence, je ne sais comment dire… En tout cas, lorsque je les regarde aujourd’hui, la plupart auraient pu être faites à la chambre ! Mais voilà, Frank, Friedlander et d’autres avaient traversé les Etats-Unis en photographiant au Leica, il fallait que je traverse de la même manière les États-Unis en photographiant au Leica (et au 6x6, le 6x7 n’était pas encore arrivé dans ma panoplie) ! Et je n’étais pas prêt non plus à m’inscrire dans une économie de prises de vue différente. Je craignais qu’en photographiant à la chambre, je sois obligé de restreindre de façon trop drastique le nombre de prises de vue, alors que j’avais encore besoin d’acquérir de l’expérience, de multiplier les photos « pour voir » et que les Etats-Unis m’offraient un champ d’expérimentation formidable !

 


Thierry Girard © - Pondichery, 2011

 

 

Pourquoi pas la chambre en plus, « pour voir » justement ?

Je n’avais jamais travaillé à la chambre, et je ne me voyais pas en train d’en apprendre le maniement au bord de la Route 66 ou d’une autre… Je me faisais un monde du travail à la chambre, alors que ça demande surtout un peu de méthode, et au fond ce n’est pas sorcier, même si ça impressionne le chaland ! J’aurais du demander à Meyerowitz de me donner un cours particulier…

 

Alors, justement, qu’est-ce qui a changé pour que la chambre devienne l’outil adapté à votre travail ?

J’ai passé plus de quinze ans à photographier quasi exclusivement au 6x7, et puis, à un moment, j’ai senti que ça coinçait. Malgré la très grande qualité du Mamyia 7, je voulais monter d’un cran en finesse et en détail, et je voulais encore mieux travailler le paysage urbain en utilisant la possibilité de décentrement que m’offrait la chambre. Mais surtout, je suis arrivé à un moment de ma pratique photographique où « l’économie » que suppose la chambre devenait presque nécessaire. Par économie, je n’entends pas le coût, puisque globalement ça me coûte plus cher, mais le fait de devoir faire un nombre d’images restreint, sans aucune frustration, tout simplement parce que les images que je fais suffisent. Pas besoin de multiplier les prises de vue, de tourner autour du sujet comme on tourne autour du pot, pas besoin d’assurer (ou alors, je le fais au 6x7, parce que j’en ai toujours un à côté), mais le sentiment d’avoir acquis une telle maîtrise de mon esthétique que je peux m’imposer désormais cette « discipline ». Ça n’empêche pas pour autant la prise de risque où la photo prise, là encore, pour voir à quoi ressemble le monde une fois photographié ! Mais je n’ai plus besoin de rentrer le soir à l’hôtel avec une besace remplie de films. Si j’ai fait dix plan-films dans la journée, c’est bien, je suis plutôt satisfait.

 

Il y a évidemment moins de déchets lorsqu’on travaille à la chambre !

Bien sûr, c’est difficile d’établir des proportions, mais il m’arrive, sur une planche-contact de 4 négatifs 4x5 de numériser l’ensemble, alors que sur une planche de 120, je vais en numériser 4 sur 10 au grand maximum, et sur une planche de 24 x 36, 4 sur 36 ! Et ne parlons pas de la catastrophe numérique ! Je ne veux pas dire que tout est bon lorsqu’on travaille à la chambre, mais les images réalisées sont plus « choisies », plus « pensées » ; et même si on peut être dans la déception en voyant le résultat (le négatif seul ou la planche), il y a souvent la tentation de numériser malgré tout, pour confirmer ou infirmer le premier jugement.

 

Vous travaillez avec une Wista 4x5, c’est une très jolie chambre en bois, mais ce n’est pas vraiment une chambre « technique ». Aviez-vous un projet précis au moment où vous avez acheté cette chambre ?

En fait, j’ai acheté cette chambre en 2006 car je préparais un projet dans le Limousin où je savais que j’allais devoir faire relativement peu de photos, même si ce projet s’inscrivait dans une longue durée. J’avais besoin de quelque chose de simple (à part le décentrement je n’utilise pas grand chose, toujours mon rapport minimal à la technique), et de léger, facile à transporter dans un sac à dos. Donc une petite folding en bois, c’était parfait pour moi. Ça a donné Paysages insoumis, un livre qui a été publié en 2012 aux éditions Loco. Et dans le même temps, j’ai commencé deux projets sur Shanghai qui ne nécessitaient pas non plus énormément de photos. Pour ces projets, j’ai mélangé 6x7 et 4x5, mais je me suis vite aperçu que la prise de vue à la chambre, en milieu urbain, apportait encore plus de sérénité dans le rapport aux autres. Cela génère évidemment de la curiosité, de l’amusement (parfois un peu d’ironie), mais surtout du respect ! Jamais un flic en Chine viendra emmerder quelqu’un qui travaille à la chambre ! Et j’ai surtout constaté que si je gardais encore le 6x7 pour les portraits dans la rue (pris sur pied évidemment), lorsque j’ai commencé mes premiers portraits à la chambre ça a accentué une forme de solennité dans l’échange. Après, tout dépend des conditions : dernièrement, en Biélorussie, j’ai fait dans des villages des portraits en extérieurs et en intérieurs, et pour ces derniers, j’ai privilégié le 6x7 à cause des lumières trop faibles à l’intérieur des maisons.

 


Thierry Girard © - Biélorussie, 2014

 

Mais vos portraits récents au Japon sont tous faits à la chambre ?

Oui, pour ce travail réalisé dans le Nord du Japon après le tsunami, à deux ou trois photos près, tout a été réalisé à la chambre, portraits et paysages. J’y tenais particulièrement pour la raison suivante : cette représentation du paysage de la catastrophe avait généré des milliers et des milliers de photographies, amateures ou professionnelles. Je me devais, compte tenu du contexte et de mon rapport au Japon, de proposer une alternative radicale : photographier le moins possible, alors que tout se prêtait à l’accumulation d’images, mais photographier le plus intelligemment possible. J’ai développé et expliqué tout ça sur mon blog…

 

 


Thierry Girard © - Tohoku, Japon, 2011


 

 

 

 

Sur votre blog, on peut voir aussi des photos récentes prises en Inde, mais apparemment, là, pour ce projet qui n’est pas terminé, il y en a très peu à la chambre ?

Oui, en Inde j’ai renoncé à amener la chambre, trop compliqué, trop risqué… A part un séjour à Pondichery… Photographier les rues étroites et populeuses de Bénarès —ou de la plupart des villes—, c’est impossible à la chambre, à moins d’attendre la nuit tombée ou alors de se mettre à distance en photographiant par exemple depuis un bâtiment, ce que certains photographes ont fait, et non des moindres, comme Peter Bialobrzeski qui a photographié le soir en intégrant le mouvement de la foule…

 


Thierry Girard © - Pondichery, 2011

 

 

L’avenir ? La chambre numérique ?

Franchement, je ne sais pas. Je n’ai pas les moyens de m’acheter un dos numérique pour une chambre à 50 M de pixels. Je pourrais m’acheter un Blad d’occasion ou un Pentax 645 Z, mais j’aurais l’impression alors de perdre quelque chose qui me semble essentiel, qui est tout simplement le protocole de prise de vue à la chambre. Et puis, ces outils ce sont des reflex, j’ai déjà dit ce que j’en pensais… J’ai encore du mal avec le numérique, j’aime la beauté du négatif, et sa matérialité. Mais, une fois encore, tout dépend de ce que je vais devoir photographier dans les projets qui arrivent. Si un dos numérique peut m’apporter un nouveau confort et me permettre de faire des photographies qui posent des problèmes de réalisation à la chambre argentique, pourquoi pas ?

 

Quel genre de problèmes ?

Je l’ai déjà évoqué : des portraits d’intérieurs un peu sombres, sans ajout de lumière, des rues grouillantes, que sais-je encore, des vues urbaines de nuit… S’il s’agit de photographier de grands paysages naturels, je ne vois pas l’intérêt d’un dos numérique.

 

Et le passage au 20x25 ?

Bonne question ! Je parlais d’économie et là on change d’échelle : ce n’est plus simplement la question du nombre de photos, mais de leur coût. Une journée de travail avec 10 plan-films 4x5, c’est 200 euros, ou un peu moins. Dix plan-films 20x25, c’est 600 euros ! On ne joue plus dans la même cour ! Si on me donne les mêmes budgets qu’à Raymond Depardon, je veux bien, sinon…. Je vais vraisemblablement faire l’année prochaine un nouveau projet aux Etats-Unis, et je vais étudier la question, sachant que tout coûte moins cher là-bas : le matériel, les films, le labo…

 

Comment pourriez-vous résumer « l’art » de photographier à la chambre ?

En-dehors du résultat lui-même, de la qualité de l’image produite, ce qui me semble important, c’est justement le protocole : le choix du point de vue ou du sujet à photographier, la précision de son cadrage et de sa construction sur le dépoli de la chambre, le temps passé (qui n’est pas toujours si long) à faire les réglages ; cette inscription de la durée qui donne le temps de penser l’image, quitte à renoncer à photographier lorsque tout est prêt, et qu’on se dit que finalement ça n’en vaut pas la peine… Et surtout, ce sentiment d’être dans un rapport maîtrisé au temps, de pouvoir photographier parfois dans une quasi immédiateté, et pour la photo suivante de devoir attendre plusieurs minutes, un quart d’heure ou plus avant que quelque chose advienne. Pour les portraits, ça crée à la fois une élégance et une tension particulières. Et paradoxalement, c’est plus facile d’arrêter quelqu’un dans la rue et de lui demander trois à quatre minutes de son temps pour faire un portrait à la chambre, que de l’arrêter pour lui voler son portrait en quelques secondes au numérique.

 


Thierry Girard © - Biélorussie, 2014

 

 

Quels sont vos projets, sur quels concepts travaillez-vous actuellement?

J’essaye toujours d’avoir plusieurs projets au feu, ce qui me permet de travailler sur des concepts ou des problématiques de travail différentes en même temps. Pour être très synthétique, disons que j’ai à la fois des projets de territoire et des projets d’itinéraires. Les premiers m’amènent à développer une thématique de travail sur un territoire précis, délimité, et c’est sur ce type de projets que j’ai le plus travaillé ces dernières années, notamment en France. Mais je suis en train de réactiver les seconds parce que, au fond, c’est dans ma manière de construire esthétiquement et de penser intellectuellement mes parcours que se trouve sans doute la partie la plus « décisive » de mon travail, pour reprendre des termes employés précédemment. Je suis par exemple en train d’élaborer de nouveaux projets de ce type, très ambitieux, en France et aux États-Unis, tout en ayant sur le feu des projets de territoire en Chine ou en Biélorussie, ou un projet mixte qui est un itinéraire assez court dans une région du Japon. Pour le reste, je me permets de renvoyer les lecteurs aux pages de mon blog où je développe régulièrement quelques réflexions sur ma pratique et éventuellement celle des autres…

 

Votre œuvre semble difficilement accessible au grand public, ce que vous projetez le sera-t-il davantage?

Difficilement accessible ? C’est bien une fausse idée ! Je sais bien que c’est parfois un reproche que l’on me fait, mais ça me laisse toujours perplexe ! S’agit-il d’ailleurs d’un reproche, ou simplement la constatation que je ne cherche ni la séduction facile, ni la lisibilité ou la compréhension immédiates ? Mes photos sont un peu codées, soit ! Et je ne laisse pas toujours le mode d’emploi et les clés sur la table, d’accord ! Mais en même temps, elles sont très simples, du moins c’est ce que je pense… C’est vrai que je ne m’arrête pas à l’apparence des choses, et que même mes paysages vernaculaires les plus ordinaires s’échappent du carcan étroit de la banalité parce que j’essaye toujours de leur conférer de l’épaisseur. Une épaisseur parfois un peu fictive, un peu forcée, mais c’est un concept auquel je tiens beaucoup et sur lequel je suis revenu à de multiples reprises dans mes écrits. Et je parlerai même aujourd’hui d’une double épaisseur : celle propre à chaque paysage, à ses vibrations internes ; et celle que je surajoute, une sorte de paysage intérieur, nourri de multiples choses, qui vient se glisser subrepticement, comme un filigrane discret, dans la trame du paysage réel…

 


Thierry Girard © - Shanghai, 2010

 

 

 

Dernière modification de cet article : 2014

 

 

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