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les auteurs

 

Thérèse Verrat
et Vincent Toussaint


© Alexandra Catière

https://verrat-toussaint.com/

Thérèse Verrat
née en 1984 à Nice, s’initie à la photographie et aux arts plastiques à l’école préparatoire de Nice. Elle intègre l’Ecole Nationale Supérieure d’Architecture de Marseille avant de poursuivre ses études en Histoire de l’Art à Paris.
Vincent Toussaint
né en 1988 à Gonesse, est diplômé de l’école des Gobelins, section Photographie. Photographes et plasticiens, ils placent leur pratique dans les champs du documentaire et de la nature morte.

    

Thérèse Verrat
et Vincent Toussaint

thérese verrat et vincent toussaint
©Thérèse Verrat et Vincent Toussaint

 

Thérèse et Vincent comment en êtes-vous venus à la photographie ?

Thérèse Verrat :
J’ai d’abord été formée en architecture, puis en histoire de l’art. À l’époque, je pratiquais la photographie de manière très intuitive. Sans doute par manque de connaissance, je me servais davantage de ses qualités plastiques que de ses propriétés techniques. Par la suite, j’ai abandonné l’outil pour collaborer avec des artistes : je construisais les décors qu’ils capturaient. Lorsque j’ai rencontré Vincent, j’ai recommencé à photographier. Assez naturellement, nous en sommes venus à travailler ensemble.

Vincent Toussaint :
J’avais 9 ans quand j’ai commencé à photographier des œuvres d’art dans les musées parisiens que ma grand-mère m’emmenait visiter. S’en suivaient des séances de projections dont je me souviens encore aujourd’hui. Toutes ces photos ont malheureusement disparu l’an dernier dans un incendie. J’ai renoué avec la photographie à la fin de l’adolescence, à l’occasion d’un voyage, avant d’intégrer l’école des Gobelins en 2011.

 


©Thérèse Verrat et Vincent Toussaint

 

Pourquoi travaillez-vous à deux ?

Pourquoi ne pas travailler à deux quand on partage autant ? Les gens sont souvent perplexes face à l’idée du duo en photographie, et dans l’art en général. Il s’agit pourtant d’une force : le dialogue est toujours fertile et nous stimule à chaque étape de nos projets. Pour nous travailler ensemble est une force, sûrement celle qu’il nous fallait pour assumer ce choix.

 


©Thérèse Verrat et Vincent Toussaint

 

Dans votre travail on sent un goût très fort pour la courbe. Pourquoi ?

Parce qu’elle mène d’un point à un autre, la courbe est indissociable de l’idée de mouvement : se déplacer revient quelque part à tracer une ligne. Chacune de ces trajectoires nous permet d’appréhender un territoire, mais aussi son histoire. La courbe est douce : elle permet de changer de direction sans former d’angles. Cet attrait pour la courbe fait par ailleurs écho à notre goût de la rencontre : suivre une courbe, c’est se pencher sur quelque-chose d’extérieur à soi. Et par conséquent, accepter d’être modifié par elle.

 


©Thérèse Verrat et Vincent Toussaint

 

On sent également beaucoup de pudeur ou de retenue, presque de la tendresse ?

C’est très juste. On pourrait même parler de fragilité : tant sur le fond que sur la forme, c’est cette tension, ce point d’équilibre qui nous intéresse. En atteste notre fascination pour les ruines antiques et contemporaines, pour les paysages ou plus largement, pour la nature. Cette réserve est aussi le fruit du mélange entre soi et l’autre, de ce langage duel. Comme le dit Virginie Huet, auteure et critique d’art, notre œil « berce et brutalise ». Nous portons une attention particulière à quantité de choses, souvent ordinaires, qui, vues de plus près, semblent précieuses. Une sorte de métamorphose qui rappelle le pouvoir du regard amoureux.

 


©Thérèse Verrat et Vincent Toussaint

 

Vos photographies procèdent souvent de moments qu'on dirait volés. Sont-ils arrachés à l'indifférence générale ou arrachés au temps ?

À l’indifférence générale, certainement, oui. Au temps, aussi. Depuis quelques mois, nous travaillions autour de photographies prises à Naples, d’avril à mai 2022, dans un périmètre réduit. Nous empruntions chaque matin le même chemin, sans que cette répétition ne dicte notre démarche. Le temps n’existait plus en effet, ni le nôtre, ni celui du sujet.
Quant à cette sensation d’images prises à la sauvette, elle est probablement liée à cette timidité, cette forme de réserve que nous partageons.

 


©Thérèse Verrat et Vincent Toussaint

 

Il y a de nombreuses citations à la grande tradition artistique dans vos travaux. Pourquoi ?

C’est un mot fort, la tradition ! Le simple fait d’utiliser un outil dans sa forme primitive (l’appareil argentique) trahit notre volonté de faire perdurer. Après tout, un artiste est témoin d’une époque, mais aussi spectateur du patrimoine édifié par d’autres avant lui. Il navigue dans le temps et l’espace, et donne à son tour, grâce à son œuvre, une vision du monde. On ne peut nier l’influence du contexte : le terrain vierge n’existe pas. Citer la grande Histoire de l’art sans la paraphraser est aussi difficile que d’imaginer y laisser une trace. Comment admirer le sublime et parvenir à le restituer de façon personnelle, nouvelle ? Le mystère reste entier. Toujours est-il que ces paysages méditerranéens qui nous aimantent, ceux auxquels notre photographie rend hommage, ne sont que des champs de ruines, témoins d’une grandeur passée. Autrefois architectures, elles s’offrent à nous dans leur fragilité, très loin de leur splendeur d’origine. Ces pierres dispersées comme les moutons d’un troupeau inspirent le respect, et nous inspirent tout court.

 


©Thérèse Verrat et Vincent Toussaint

 

Que représente cette photographie et qu'est-ce qui vous plait en elle ?

C’est amusant que vous ayez choisi cette image. Elle nous pose problème depuis quelque temps. Nous en avions réalisé un tirage à l’occasion d’une exposition. Or le choix du format était une erreur. C’est une question décisive, cette forme que prend la photographie, indépendamment de ce qu’elle représente, cet objet qu’elle devient au risque de l’éloigner de son sujet. En l’occurrence, une table ajourée et l’ombre qu’elle dessine au sol, dans une maison de famille. Il s’agit du négatif d’un Polaroid. Un objet positif/négatif qui, à force d’être trop inversé, trop manipulé, a fini par nous perdre, nous lasser. En le retrouvant aujourd’hui, six ans plus tard, nous lui préférons sa forme d’origine.

 


©Thérèse Verrat et Vincent Toussaint

 

On voit passer souvent dans vos travaux des négatifs argentiques couleurs comme cette image, présentés à côté de positifs "normaux". Pourquoi ce choix ?

La découverte du négatif sur la table lumineuse a quelque-chose de magique,
d’hypnotique. Dans certains cas, cette expérience suffit. Formes, volumes et motifs se devinent à travers un voile quasi abstrait. Une abstraction qui peut même
dépasser le réel. Parfois, il nous semble pertinent de s’arrêter là, à ce stade
préliminaire. La cohabitation avec l’image finale questionne la matière
photographique, comme une preuve tangible du processus de développement.

 


©Thérèse Verrat et Vincent Toussaint

 

Qu'est-ce pour vous qu'une belle photographie ?

Une image sincère, capable d’émouvoir au point de rester en mémoire. Une belle photographie raconte une histoire. Elle est une fenêtre ouverte sur le monde visible et son envers, ce qui dépasse l’entendement.

   

 

 

dernière modification de cet article : 2023

 

 

     

 

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