Photographie panoramique
au CoreLeveler 75 clicPan
d'Arca-Swiss
par Henri PEYRE
Introduction
La sortie par Arca-Swiss du
système clicPan, système de mouvement panoramique à angle variable, réglable
simplement au moyen d'une bague sur le mouvement lui-même, est
l'occasion de s'intéresser une nouvelle fois aux compositions
d'images en photographie panoramique.
On peut faire des images
panoramiques pour obtenir... des panoramas, mais on peut aussi
fabriquer par la composition d'images multiples une seule image de
très haute résolution, bien plus résolue qu'une image sortant du dos
numérique le plus moderne.
Les logiciels de composition de
photographie panoramique sont de leur côté de plus en plus
performants et rattrapent pas mal de petits ajustements mal faits à
la prise de vue. En les aidant un peu avec une prise de vue à peu
près propre, on obtient assez facilement de bons résultats.
Dans cette perspective j'ai testé en
avant-première le
CoreLeveler 75 clicPan de chez Arca-Swiss. Je
prends dans cet article prétexte de sa sortie pour rappeler aux
débutants les 3 types d'acquisition panoramique principaux,
panoramique horizontal un rang (appareil en paysage), panoramique
horizontal un rang (appareil en portrait), panoramique horizontal
multi-rangs (appareil en portrait).
Pour ne pas trop aider la rotule, je me sers au montage d'un vieux
Photoshop 12.1, avec son encore très extérieur assistant
Photomerge, qu'on appelait dans la commande Automatisation
Photomerge.
Les logiciels de montage récents se sont énormément améliorés. Ce
que je j'arrive à faire avec un vieux logiciel de composition, vous
le ferez encore plus facilement avec n'importe quel logiciel récent.
Plus sévèrement encore je réalise ici
dans la partie test un panoramique d'intérieur, avec des objets très proches. On sait en
effet que faire un panoramique à main levée avec les premiers objets
à plus de 8m ne pose aucun souci. Ceux qui auront essayé avec des
objets proches savent que l'affaire est toute autre.
J'ai ainsi la curiosité de voir ce
qu'on peut attendre du Coreleveler 75 clicPan monté en rotule
généraliste sur un trépied. Le test est mené avec un vieux Nikon
D800E avec son objectif lui aussi généraliste de 50mm (AF-S Nikkor
50mm f1:1.4G).
Description rapide du CoreLeveler 75 clicPan
Le CoreLeveler clicPan d'Arca-Swiss a
été annoncé fin octobre 2022, en même temps que la "famille clicPan", composée de trois rotules photographiques et
de leurs
déclinaisons suivant les types de mâchoires montées : la moderne (et
bien meilleure en facilité d'utilisation, rapidité et sécurité
d'usage) fixation Monoballfix encore sous brevet, et les fixations
Classic et Fliplock autour du vieux standard Classic, mal commodes
mais dont le brevet est tombé dans le domaine public.
Sur l'illustration ci-dessous on
découvre de gauche à droite
- le CoreLeveler 75 clicPan avec une fixation Monoballfix,
- un cube C1 clicPan avec une monture Fliplock,
- une P1+ en monture Classic à vis.

Il existait déjà auparavant des
rotules CoreLeveler, Cube C1 et P1+.
La nouveauté est le système panoramique sommital clicPan,
reconnaissable à sa bague d'un bronze très chic, qui est proposé en
remplacement du système panoramique micrométrique ou libre des
rotules déjà existantes. Cet extrait du
mode d'emploi des Leveler en
explique le fonctionnement ; la bague bronze y est l' "adjustment
ring":

Le principe de base du mouvement
panoramique est très simple :
On choisit l'angle de rotation panoramique qu'on désire en
positionnant la bague bronze sur un chiffre donné : par exemple 30°,
qui autorise une rotation de l'appareil sur lui-même d'un tour complet
avec 12 arrêts suggérés. Lorsqu'on tourne manuellement l'appareil on
entend un petit clic et on sent une proposition de type "point
zéro" tous les 30°.
Le choix de la position 0 permet de choisir une
rotation complètement libre. Le fonctionnement est d'un moelleux
impossible à décrire ici... on se contentera donc d'une
petite vidéo
sur Vimeo pour s'en donner une idée.
Le mécanisme de la bague bronze est vraiment d'une très
grande simplicité et beauté technique et il étonnera certainement tous ceux d'entre vous qui ont déjà utilisé des rotules
panoramiques où l'on devait changer des jeux de rondelles pour
réaliser la même opération.
La présence de ce mécanisme parfait définit la famille clicPan.
Parlons du
CoreLeveler 75 lui-même à
présent.

CoreLeveler 75 © Arca-Swiss
Le CoreLeveler 75 est à l'origine une
rotule destinée à la mise à niveau rapide de chambres lourdes. Dans
la théorie, on sait qu'on commence toujours une prise de vue à la
chambre par la remise à zéro de tous les mouvements de l'appareil et
par la mise à niveau de la chambre sur le trépied.
Une rotule de mise à niveau permet de s'accommoder des
positionnements approximatifs du pied. On met grossièrement le pied
en place et on peaufine le niveau grâce à la rotule de mise à niveau
(leveler en anglais).
Pour la mise à niveau, on dispose de deux
mouvements micrométriques en berceau. Ces berceaux peuvent permettre
par alternative un travail extrêmement précis et confortable de cadrage sur le
terrain si on ne se sert pas d'eux pour faire la mise à niveau du
pied, mais pour aider à la visée. Ils permettent alors une approche très précise du sujet en
particulier en photographie d'architecture quel que soit appareil
photographique employé.
La rotule est très bien montée et porte fermement l'appareil, avec le moins
de vibration possible.

CoreLeveler 75 © Arca-Swiss
Les caractéristiques du
CoreLeveler sont les suivantes, dans la version Monoballfix :
Type : tête à engrenages micrométriques
Poids : 690 g
Charge admissible : 40 kg
Dimensions : 121x110x110 mm
Diamètre de base : 75 mm
Système d’attache au trépied : pas de vis 3/8"
Panoramique inférieur : Oui, 360°
Panoramique supérieur : Oui, 360°
Bascules des berceaux : +15/-15° en X et Y à réglage micrométriques
autobloquants
Niveaux : 2 niveaux tubulaires à bulle
Contrôle de la friction : Non
Caractéristiques du panoramique supérieur : Panoramique pas à pas
avec 10 pas
angulaires sélectionnables - 40°, 30°, 24°, 20°, 15°, 12°, 10°,
7.5°, 6° et « OFF » pour un
rotation libre à 360°
Réalisation
d'un panoramique horizontal à 1 rang,
appareil en paysage
Le panoramique horizontal 1 rang,
appareil en paysage est le premier type de panoramique auquel
s'attaque l'amateur. Il répond à la sidération que la beauté d'un
vaste paysage cause au photographe. L'appareil est tenu en mode
paysage et le photographe tente de s'approprier le plus d'espace
possible à l'horizontal. Le paysage est plus vaste encore que
l'appareil ne permet de s'approprier. Vient l'idée de juxtaposer à
l'horizontale plusieurs clichés pris en paysage et de les fusionner
entre eux, de sorte de n'obtenir qu'un long cliché qui
embrasse tout le paysage.
La méthode d'acquisition obéit à quelques principes :
- On tâche de prendre les photographies successives avec un recouvrement de 30%.
- Pour un meilleur assemblage logiciel, on essaie d'éviter la
présence d'objets trop proches qui pourraient se trouver dans
une zone de raccordement des images.
- L'appareil est placé à niveau sur le pied grâce à la rotule.
Voici quelques résultats obtenus avec l'appendice Photomerge de Photoshop,
comme on pourrait en obtenir avec tout autre logiciel destiné à la
photographie panoramique.
Le procédé est d'ailleurs présent aussi sur les téléphones portables
où, comme avec l'appareil photographique, pour peu qu'on soit
soigneux et qu'on n'inclut pas de premiers plans trop proches, cela
marche presque à tous les coups.
Ici nous envisageons de combiner trois images. Photomerge nous
demande sous quelle forme de projection assembler ces images :

Nous laissons d'abord la coche sur le mode Auto. Voici le résultat :

En choisissant la projection cylindrique on obtient un tout autre
aspect au montage :

La projection sphérique donne un aspect proche du précédent :

Les deux dernières projections semblent les plus agréables et
gaspillent moins de pixels. On les préférera donc, pour une image
finale de 127 cm de large sur 40 cm de haut avant massicotage dans
Photoshop.
Toutefois sur un horizon un peu vaste,
et suivant le sujet acquis, il peut y avoir d'importants changements
de lumière d'un bord de champ à l'autre, en témoigne ce
panoramique à 5 vues :
Avec ce genre de panoramiques c'est la
principale difficulté. Suivant cette règle qu'il
faut sauver les hautes lumières, auxquelles les yeux
humains sont les plus sensibles, on choisira donc sur l'appareil
photo un mode d'exposition manuel et on fera le
réglage sur la zone la plus lumineuse du panorama qu'on entend
recueillir. Et c'est avec ce réglage qu'on prendra toutes les
photos... quitte à rejouer l'ouverture naturelle de l'œil humain en
utilisant après l'assemblage un réglage de niveau sur masque de
Photoshop pour remonter un peu la lisibilité dans les ombres de la
partie gauche de l'image :
Je suggère ici une
recommandation pour le photographe sur le terrain sans pied et sans
rotule. Il mettra son corps entier tourné vers la dernière image
qu'il envisage de prendre. Lors de la prise de vue, il tournera son
corps vers la première prise de vue puis reviendra au fur et à
mesure des prises de vue vers la position originale de face. En
général les amateurs ont tendance à faire le contraire ; ils se
mettent face à la première image qu'ils envisagent de prendre puis
tournent le corps au fur et à mesure. Cela produit un déséquilibre
du corps qui non seulement a tendance à les faire tomber, mais
induit au minimum une fâcheuse descente de la prise de vue à mesure que l'on tourne.
A l'assemblage, comme on tâche de retrouver un
horizon droit, il faut couper le montage en haut et en
bas. Or comme toutes les photos ont déjà été prises en paysage, la
bande finale va être encore plus étroite dans sa hauteur. C'est là
l'avantage définitif de travailler avec une rotule même sur
ce type de panoramique facile à assembler. On travaille à la rotule pour
garder une bonne horizontalité de la première à la dernière vue, de
sorte de réaliser un montage sans déchet dans la hauteur,
celle-ci étant au départ déjà faible.
Il n'y a pas grand chose à ajouter aux
commentaires déjà énoncés sur le panoramique horizontal à 1 rang,
appareil en paysage.
Les panoramiques obtenus font évidemment un effet de bande
longue ; ils donnent toujours l'impression, étant
constitués de photographies contigües en paysage, d'être bas de
plafond. Une astuce pour contrarier cette impression pénible est de
choisir d'encadrer le panoramique de chaque côté par des éléments
sombres, comme dans les panoramiques ci-dessus. L'effet de cadre
réduit la perception de l'allongement excessif de la vue.
Ce type de panoramique est adapté à l'évocation des chaînes de
montagnes, à la description de vastes vallées ou de grandes plages de
sable en bord de mer, mais, finalement, la gamme des sujets peut
apparaître un peu limitée.
Le principal problème rencontré vient plus de la gestion de la
lumière que de la prise de vue et du montage. C'est probablement le
principal facteur limitant du panoramique horizontal à 1 rang, avec
l'appareil en paysage. C'est pourquoi
j'insisterai un peu plus sur le deuxième grand type de panoramique
courant, qui est bien plus utilisé, et bien plus intéressant dans
les résultats obtenus.
Réalisation d'un panoramique horizontal à 1 rang, appareil en
portrait
Ce type de panoramique est
bien plus intéressant pour les raisons suivantes :
- il permet de faire des panoramiques sans effet de plafond bas, en
cumulant par exemple 3 ou 4 vues prises en portrait,
- il permet d'obtenir un effet grand angulaire même si on ne dispose
au moment de la prise de vue que d'un objectif standard,
- il permet de réaliser des vues de très haute définition en cas de
besoin. Il nécessite
toutefois :
- une rotule, la mainlevée devenant plus difficile
puisque le positionnement des 30% de recouvrement de l'image pris,
cette fois, dans le partage de son petit côté, tolère moins d'erreur de
positionnement,
- un montant en L pour monter sur le pied
l'appareil en position portrait, tout en maintenant une rotation qui
ne soit pas désaxé par rapport à l'axe de la rotule,
- une plaque longue qui permet d'avancer ou de
reculer l'appareil sur la rotule de sorte que ce soit le centre
optique de l'objectif qui puisse être placée sur l'axe de rotation
de la rotule, et pas le corps de l'appareil.
Dans la présentation du premier type de panoramique, bien connu de
l'amateur et facile à réaliser, nous nous étions contentés de
recommander au photographe de ne pas mettre d'objets proches dans le
champ de la prise de vue. Dans ce second type de panoramique, à
emploi courant dans la photographie professionnelle, nous devons
insister sur les précautions à prendre pour que ces
objets proches soient bien gérés par les logiciels d'assemblage au
moment de la construction du panoramique.
Pour que tout marche bien, il faut en effet s'assurer non plus
seulement de l'horizontalité de la prise de vue mais d'une fixité
quasi parfaite de la position du système photographique placé devant
le sujet. Plus exactement, l'objectif photographique présente un
centre optique qu'on appelle la "pupille d'entrée", où se
croisent les rayons lumineux envoyés par l'objectif sur le capteur (1).
S'il y a des objets proches, on cherche où est la pupille d'entrée
de l'objectif et on tâche de placer l'appareil photo sur la
rotule de sorte que lors du mouvement panoramique la rotation ait
lieu exactement autour de cette pupille d'entrée (qui est
souvent au centre physique de l'objectif mais pas tout le temps).
Pour ce faire le plus simple est probablement d'utiliser la méthode
qui consiste à limiter la parallaxe lors de la rotation de
l'appareil (2).
Pour ce faire, on place l'appareil monté sur le montant en L bien de
niveau sur le pied. Pour le montant en L je vous conseille la
Plaque rapide MonoballFix universelle en L 2 bases de chez Arca-Swiss (3).
Sous l'appareil on fixe une plaque longue. Ici la
plaque Monoballfix
100 ref 802283 de chez Arca-Swiss.

On vise deux montants d'une fenêtre bien ouverte (c'est mieux si
un peu de soleil tombe dessus), on place l'appareil en mode liveview
très proche
et, tandis qu'on tourne l'appareil photo de droite à gauche et de
gauche à droite, on surveille l'écart entre les deux montants de la
porte. Cet écart doit être constant lors de la rotation. Si
l'écart n'est pas constant on avance ou on recule l'appareil photo
sur sa plaque longue(5) jusqu'à trouver la position
où il demeure enfin constant.


On notera, dans cette recherche de la pupille d'entrée, qu'un objectif médiocre présente une
image déformée et des verticales de portes peut-être pas si
verticales que cela sur les côtés de l'image. On fera donc du mieux
qu'on peut avec son matériel, et surtout, on se rappellera que les
objectifs médiocres peuvent être corrigés par les profils
d'objectifs quand l'image est prise en Raw. Le retraitement par les
profils fournis par le logiciel de traitement d'image (au pire par
l'appareil lui-même au moment de la prise de vue si on travaille
directement en jpg) doivent être absolument utilisés à l'acquisition
des images de base, pour le meilleur assemblage possible.
Exemple du processus en image : nous avons photographié une pièce
avec des objets proches de sorte de vérifier ainsi que l'assemblage
des objets même disposés à moins d'un mètre de l'appareil
photographique était parfait. Le mode
opératoire est le suivant :
- L'appareil est utilisé en mode manuel. Toutes les
vues doivent être exposées de la même façon. Nous vérifions
soigneusement à l'histogramme pour ne brûler aucune haute lumière.
- La mise au point aussi est manuelle ; comme nous
sommes dans une petite pièce nous faisons la mise au point juste
après les fauteuils entre 1/2 et 1/3 du champ à couvrir.
- La prise de vue a lieu en RAW pour rattraper
au maximum les écarts entre les hautes et les basses lumière lors du
développement des images.

- Le développement effectué dans Camera Raw vise à diminuer au
maximum le contraste entre l'extérieur et l'intérieur de la pièce en
remontant les basses lumières où se trouvent la plupart des pixels
décrivant la pièce. Précaution :
- On demande bien pour toutes les images l'application de correction de profil
d'objectif en choisissant dans la liste déroulante notre
profil d'objectif pour neutraliser au vol toutes les déformations
qui menaceraient notre assemblage.

- Nous lançons dans Photoshop la commande
Fichier/Automatisation/Photomerge et appelons la série de
photographies qui nous semble la mieux prise :

- A la fin du traitement, qui peut prendre un certain temps suivant
la résolution des images de départ, Photoshop nous propose une
fusion des images. Chacune apparaît dans un calque (en haut à
gauche), accompagnée d'un masque. Sur le masque figure en blanc la
localisation des pixels que Photoshop propose de retenir pour
l'assemblage. En noir les pixels qui ne seront pas retenus. Si on
est d'accord, on peut aplatir notre image pour fusionner les calques
en une seule photographie.

- Après massicotage dans Photoshop on obtient la photographie
finale.

Les raccords sur les fauteuils en proche premier-plan sont parfaits.
La préparation de la rotation autour du point nodal et la régularité
dans la prise de vue assurée par le système clicPan de la rotule ont permis
d'obtenir cet assemblage avec la plus grande facilité.
On note simplement la déformation de la poutre en haut de l'image,
assez visible (les planchers en bas ont pris un peu
d'arrondi mais on s'en rend moins compte). Ces déformations sont
inhérentes au procédé d'assemblage choisi. On va les retrouver exacerbées dans l'étape
suivante. Réalisation
d'un panoramique horizontal multi-rangs
Ces panoramiques sont rarement
pratiqués en photographie pour plusieurs raisons :
- Ils sont en général longs à fabriquer. De ce
fait, ils ont connu leur heure de gloire au moment des débuts de la
réalité virtuelle mais on a vu arriver progressivement des appareils
spécialisés qui permettent de faire facilement des panoramiques à
360°. C'est plutôt avec ce genre d'appareils qu'on fera aujourd'hui
des photographies panoramiques à large couverture.
- Une autre difficulté réside dans le balayage de l'espace
qui doit progressivement être étendu de plus en plus à partir du
moment où l'on quitte la position horizontale pour monter ou pour
descendre. Ce balayage étendu est nécessaire pour remplir
les coins de l'image qui resteraient vides si on se contentait de
prendre les multiples rangées de vues en ligne de la même largeur.
- Une dernière difficulté de l'exercice est enfin constituée par le
fait qu'on peut hériter de lignes horizontales proches qui ont
l'air courbes, comme avec un objectif Fish-eye, suivant
le type de projection adopté à l'assemblage. Or notre cerveau attend
que les plafonds restent à peu près droits, surtout en architecture.
Cet effet déjà ressenti dans la fabrication de notre panoramique à 1
rang peut devenir ici nettement plus désagréable.
Le panoramique horizontal multi-rangs, appareil tenu en portrait,
permet aussi de fabriquer occasionnellement des images à
très haute résolution d'une qualité exceptionnelle. Par exemple
on peut penser à faire un panoramique multi-rangs avec un objectif
de 100mm pour obtenir une seule image beaucoup plus résolue que
celle que l'on aurait obtenue avec un 50mm sur le même appareil.
De nombreux constructeurs ont leur système de panoramique
multi-rangs ; Arca-Swiss
lui-même en propose sous le nom de
Pan-Sytem (4).
Sur les rotules du Pan-System sont placés des montants en L un peu perfectionnés,
au sens où l'on trouve sur le montant vertical du L non pas une
simple mâchoire, comme dans le montant en L que nous utilisons pour
cet article, mais un mouvement panoramique. Ce mouvement panoramique
permet, si l'objectif est bien positionné par rapport à lui, de
basculer l'objectif vers le haut ou vers le bas en tournant autour
de sa pupille d'entrée.

On peut ainsi constituer des panoramiques multi-rangs qui
respectent la règle absolue de la rotation autour de la pupille
d'entrée non seulement lors d'un mouvement de gauche à droite, mais
aussi lors d'un mouvement de haut en bas. C'est cela qui ouvre la possibilité
du montage panoramique multi-rangs.
Nous n'avons pas ce système monté actuellement sur notre Corelever
75 clicPan. Donc ce genre de panoramique est théoriquement
infaisable.
Je
me suis toutefois posé pour cet article la question de
savoir si les mouvements micrométriques en berceau du CoreLeveler 75
clicPan pouvaient servir au-delà de leur simple fonction
de mise à niveau.
Ils sont conçus en effet pour que le mouvement se
fasse le plus près possible du centre l'objectif, plutôt qu'à la
base de l'appareil photo.
Que pouvait-il bien se passer si je me
servais du pied pour la mise à niveau, à l'ancienne, pourrait-on
dire, et si dans le cadre d'un panoramique 3 rangs, appareil en
portrait, je me servais du mouvement vertical en berceau
pour passer d'un rang à l'autre (je précise : avec, pour le
panoramique horizontal, le réglage de la rotation autour de la
pupille d'entrée conservé) ? Il y aurait forcément un petit décalage
en allant vers le haut et vers le bas, la prise de vue n'étant pas
aussi rigoureuse qu'avec la rotation du montant vertical au niveau
de la pupille d'entrée du MonoballPan System. Mais ce décalage
serait faible et très régulier et mon vieux logiciel d'assemblage pourrait
peut-être s'en accommoder.
Cela valait le coup d'essayer. Le mode
opératoire est tout à fait semblable, avec les mêmes préconisations
pour la prise de vue (réglage de la lumière et de la mise au point
en manuel, développement avec profil d'objectif).
Dans Photomerge, l'assemblage dans le mode automatique ne
donne pas satisfaction du tout...

Après quelques essais pas tout à fait concluants avec d'autres types
de projection...

Je finis par adopter le type de projection Sphérique...

que je complète en améliorant l'image dans le filtre de correction
d'objectif personnalisé de Photoshop :

On voit nettement sur l'image ci-dessus que je n'ai pas assez élargi
le nombre de vues prises en partie basse de l'image. Il y manque
donc de la matière.
Cela montre bien la règle : plus on éloigne la prise de vue du rang
horizontal vers le haut ou vers le bas, plus il faut élargir le rang
lors de la prise de vue. Un autre essai
avec le choix de l'option sphérique avec rang plus étendu en bas
d'image me donne ce résultat :

que je retravaille avec l'outil torsion :

pour un résultat final convenable dans les raccord mais médiocre
dans les déformations diverses :

Avec une prise de vue panoramique à 3 rangs je peux même placer
également le plafond dans la vue :

On voit bien ci-dessus l'effet Fish-Eye hérité du procédé
employé.
Ces quelques essais réalisés montrent
que la combinaison logiciel + berceau donne satisfaction
quand à la continuité des objets de premier plan avec ma
configuration (un Nikon D800E sur un montant en L : je mesure environ
12cm du plat du plateau supérieur de la rotule au centre de
l'objectif) et... le secours probable de Photomerge. Les raccords
sont impeccables et sur un assemblage à 3 rangs empilés,
avec certains des objets assez proches, les insuffisances
de l'image ne viennent pas des raccords mais des tensions dans les
perspectives. Ceci étant dit, au
fur et à mesure que je testais un assemblage puis l'autre
montait en moi le dégoût de tout ce qui n'est pas image parfaitement
maîtrisée. Ce dégoût me vient de tout ce qui ressemble de près ou de
loin à des montages un peu trop visibles, ou des effets trop marqués. Les photographes qui ont
touché à l'espèce de pureté et au contrôle
parfait de l'image qu'on conçoit dans le dépoli d'une chambre me
comprendront. Qui plus est les
déformations optiques inhérentes à ces procédés cumulatifs
sont particulièrement remarquables et malvenues
sur des sujets comme notre montage d'exemple et
l'architecture en général. Tout autre est l'effet
obtenu sur des paysages avec des végétations dominantes où les
lignes et les repères de perspectives sont confus. Les
déformations n'y sont de ce fait pas visibles. A ce moment le
panoramique horizontal multi-rangs avec l'appareil tenu en portrait
peut permettre d'obtenir des images intéressantes... puisqu'on n'y
voit pas les défauts inhérents au procédé. Et on pourrait
parfaitement utiliser cette belle rotule avec la plaque rapide
universelle MonoballFix en L 2 bases dans ce cadre précis.
Toutefois, il faut reconnaître que ce serait vraiment sans aucun
plaisir. L'aspect bricolage est lourd et menace toute inspiration.
Pour bien travailler en multi-rangs, il faut vraiment un système MonoballPan,
qui permet de tourner un mouvement vertical juste à la pupille
d'entrée de l'objectif, et on ne doit pas sortir de là.
Conclusion de cette partie
exploratoire : il faut absolument réserver cette rotule à son emploi
idéal, le panoramique 1 rang avec l'appareil photographique en
portrait. C'est le domaine d'application de Leveler clicPan 75 en
panoramique et il y est absolument parfait ! Application sur le terrain :
des sensations vraiment merveilleuses !
Maintenant que nous avons compris que
cette rotule est parfaite dans la réalisation des panoramiques
horizontaux 1 rang appareil en mode portrait, nous partons faire
quelques photographies. Disons le tout
de suite cette rotule est vraiment très belle. La qualité des
matériaux est indiscutable et on a tout de suite envie de travailler
avec. Moment d'enthousiasme donc qui porte vers l'avant, aussitôt
tempéré par un regret : l'atelier m'a envoyé pour essai une rotule
monté en fixation Classic à vis ; moi qui n'utilise plus depuis des
années que la fixation Monoballfix j'ai l'impression de revenir au
Moyen Âge. Je trouve que la plaque Monoballfix est un peu difficile
à placer sur cette entrée à deux tiroirs, qu'il faut aller chercher
la vis de fixation sous le coude du montant en L. Je ne comprends
pas qu'il y ait encore des gens pour utiliser des fixations Classic
au prétexte qu'ils ont déjà des plaques à ce vieux standard.
Personnellement je dispose de 4 plaques pour mon système Arca-Swiss.
J'ai pourtant de nombreux appareils, mais c'est toujours un peu les
mêmes qu'on utilise à chaque période. Bref, ne renoncez pas au
système Monoballfix pour des raisons d'économie de 4 plaques que
vous auriez déjà dans un autre standard. C'est absurde. Ces rotules
durent une vie entière, et l'investissement dans la meilleure
fixation du monde vaut bien qu'on sacrifie son jeu de plaques
anciennes. J'arrête là, je pense tout simplement que les gens qui
continuent avec le système Classic ne se sont jamais servis du
système Monoballfix. Franchement je ne vois pas d'autre explication.
Arca-Swiss communique sur le CoreLeveler 75 clicPan en mettant en
valeur la facilité avec laquelle, niveaux à bulle et mouvements
micrométriques aidant, on arrive facilement à faire le niveau au
moment de l'installation de l'appareil, quelle que soit la position du
pied au sol. C'est tout à fait exact. Concrètement :
- On met le pied grosso-modo en position.
- On active le premier mouvement micrométrique en berceau auquel est
associé le premier niveau qu'on met à la bulle.
- On active le deuxième mouvement micrométrique en berceau auquel
est associé le deuxième niveau qu'on met à la bulle.
Cela prend environ 15 secondes et c'est fini. On est à niveau.
Si on n'a pas encore choisi le pas de prise de vue on tourne
alors la
bague bronze jusqu'à trouver un angle qui assure un recouvrement
d'à peu près 30% entre chaque vue. Cela prend quelques 10 secondes
de plus.
On est prêt.
La liberté de choisir l'angle de rotation du mouvement panoramique
aide grandement pour un bon recouvrement de chacune des vues. Le
réglage de l'angle se fait par le positionnement de la bague, qui
réserve aussi une position libre (bague sur 0). Le déplacement d'une position à
l'autre, lorsque l'angle a été choisi est assez moelleux et ne
risque pas d'emporter le pied. Enfin l'arrivée sur la position
suivante est marqué par un pas sensible à la main et fait un petit
"clic". Tout cela est vraiment très agréable et très bien conçu.
Tous ceux qui ont déjà une rotule Arca-Swiss comprendront le genre
de plaisir que cela peut procurer.
L'intérêt de la facilité de manipulation du Leveler clicPan est
qu'on peut se concentrer sur l'essentiel, qui est la photographie.
En photographie panoramique, la composition est encore plus
difficile qu'en photographie "normale". Les premiers-plans on en
effet tendance à venir s'inviter en masse dans une image très
élargie. Le fait que le matériel soit parfaitement adapté et se
fasse oublier est véritablement un facteur de réussite pour un type
de photographie qui demande une prévisualisation extrême : comme le
montage ne se fera pas sur place, on ne voit pas le résultat à la
prise de vue. On ne peut pas compter sur l'appareil pour comprendre
ce qu'on va cadrer. On ne peut donc pas corriger.
J'ai choisi, pour faire un essai
du CoreLeveler 75 clicPan sur le paysage, le joli
site Corot à Saint-Junien (87). C'est un endroit où la Vallée de la
Glane est pittoresque au point que les locaux y ont inventé que
Corot était venu y peindre, ce qui est parfaitement faux mais à ce
point plausible que la légende est désormais solidement établie. La
municipalité s'acharne à y poser des tables à piquenique, comme si
la contemplation du beau devait irrésistiblement donner envie de
manger du saucisson. Les économies qui sont devant les collectivités
devraient heureusement peu à peu tarir ces interventions dégradantes
pour la nature et dispendieuses pour le contribuable.
Les images sont prises en Raw et développées comme précédemment avec
imposition du profil d'objectif dans Camera Raw (illustration
ci-dessous). J'ai pris l'habitude d'intercaler une photo de main
pour me signaler une fin de prise de vue panoramique (une main en
première imagette en haut à gauche). Je développe la main avec les
autres photos. Cela ne coûte pas plus cher et est bien utile pour
savoir où on en est quand par la suite on remonte une série d'images
dans Photomerge.
L'assemblage en mode cylindre de Photomerge a permis par exemple de
réunir 7 photographies faites au Nikon D800E pour cette longue image
de la rivière : on voit les masques et les zones retenues pour la
fusion finale dans la fenêtre des calques.

L'emploi de la rotule et le positionnement absolument parfait des
images les unes quasiment à côté des autres avec un recouvrement ici
bien inférieur à 30% a permis d'éviter le gaspillage de pixels : les
zones perdues et à recouper en haut et en bas sont de ce fait très limitées. On
gagne énormément sur un temps de montage qui peut, sur des images aussi
lourdes, devenir important. Ces images dépassent en effet en poids très
largement les images qu'on peut obtenir avec les meilleurs dos
numériques actuels.
Après massicotage des zones perdues on obtiendra finalement en
7 prises de vue au départ une image finale de 2,25 m sur 68 cm en
300ppp (qualité requise habituellement pour l'impression)...
Sur un bandeau de cette taille on a intérêt, comme déjà vu, de "raccourcir" l'effet
de bande en théâtralisant l'image : bords sombres et sujet
seul vraiment lumineux au centre... au total, la zone qui fait spectacle au centre représente peut-être le cinquième de l'image
totale et permet de faire oublier la longueur excessive de
l'ensemble. Les deux côtés du bandeau ne servent finalement qu'à envelopper
psychologiquement le spectateur.
Je montre un deuxième essai me semble-t-il plus réussi.
Il s'agit d'une image composée de 4 prises de vue au format
vertical.
On voit ici le résultat monté par Photomerge avec l'option
cylindrique. Les 4 images là aussi sont quasiment côte à côte,
avec très peu de recouvrement et donc quasiment pas de pertes sur
les bords :

Comme dans l'image précédente on recadre au massicot de Photoshop.
L'image finale fait 1,32m de long sur 60 cm de hauteur, en
300ppp :
Voilà cette image terminée :
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