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Michel CLEEREN
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l'auteur
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La précision de latitude et de longitude pour le lieu est une localisation faussement précise et bien muette pour le spectateur de la photographie. C'est par ailleurs un procédé très employé dans la photographie documentaire contemporaine. Pourquoi cette citation alors que vous pratiquez une photographie de grande sensibilité ? Vous êtes en guerre contre la photographie documentaire ? Ces notations sont pour moi en rapport avec le lieu de prise de vue, mais aussi, l'endroit précis où la nature modifie mes images. Lorsque j'installe les tirages à l'emplacement choisi, je laisse la main aux éléments, la pluie, le vent, la faune… Le temps qui passe fait son travail, transforme les images. Après, je récolte. Ces coordonnées sont aussi les seules choses qui ne se modifient pas pendant le processus.
Pensez-vous que les notions de chemin et de centralité aient une importance particulière dans votre photographie ? Si je regarde mes images
depuis que je suis "tombé" en photographie, je dois bien constater que
se sont des éléments récurrents dans mon
Le temps vous obsède ? L'oubli vous obsède ? Le temps est une notion toute relative. L'éphémère vit un jour, le chêne trois cents ans et une étoile… Je photographie à mon échelle et j'essaye avec ce projet, de visualiser et de matérialiser cette durée. Quant à votre question à propos de l'oubli, je trouve cela très intéressant. Est ce que le temps efface la mémoire, l'altère-t-il, ou au contraire, y fixe-t-il seulement les choses essentielles ?
Par rapport à d'autres travaux plus anciens, on a l'impression que vous vous retirez du Monde, que les traces du temps tissent une peau qui s'épaissit inexorablement entre vous et le Monde. Vous le ressentez comme cela ? Je ne pense pas me retirer du monde, au contraire, avec ce travail, je rentre dans la matière qui fait ce monde. L'image et les sédiments ne font plus qu'un. C'est vrai que cette peau organique qui se forme avec le temps, se modifie, se ride, se pigmente. Lors de mes premiers essais, le résultat n'était pas très concluant. Je ne laissais pas le temps au temps. Je n'étais pas assez patient. Puis la nature a fait son œuvre et de manière surprenante ! Moi, qui travaille exclusivement en noir et blanc pour ce projet, j'ai vu des colorations arriver. Des pigments naturels se sont mélangés à mes images. La couleur s'invitant malgré moi, discrète mais présente. Un cadeau.
Le recours à des moyens plastiques extérieurs, l'altération de la photographie, signifie-t-il que vous pensez désormais que la simple figuration photographique ne peut plus suffire à exprimer ce que vous désirez dire ? Le côté lisse, sans aspérité, d'une certaine photographie actuelle ne m'a jamais trop intéressé. La chasse aux pixels, je la laisse aux chasseurs. Dans mes travaux précédents, j'ai beaucoup utilisé le sténopé déjà pour les mêmes raisons. Je pense que dans ce travail, l'altération de la photographie par la nature ne détériore pas l'image, elle l'enrichit. Toutes les prises de vues sont réalisées en argentique, au format 6x7. J'utilise la numérisation uniquement pour le tirage final. Je fais des essais actuellement sur des photographies sans prise de vue, sans photographe. Le papier, la nature, et le temps seulement. Je verrai peut-être... avec un peu de patience…
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dernière modification de cet article : 2016
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