|
|||||||||||||||||||||||||||
L'auteur
Interview par
Voir l'article
|
Ian LeakeUne interview par François Croizet
Ian, vos compositions sont très esthétiques : les compositions sont minimalistes, puisque faites de simples courbes et d'ombres subtiles. Pourquoi cette approche ?Je trouve que l’association d’un contraste doux et de tonalités claires est parfait pour le genre de travail que je veux réaliser. Un de mes modèles de mes amies, décrit mon travail comme un « hommage à la féminité ». Et je pense qu’elle a raison parce rendre hommage aux personnes avec lesquelles je travaille est mon intention quand je les photographie. Je tente de créer des compositions qui révèlent le plus possible ce qui n'est pas montré (la totalité de la personne, à la fois son esprit et son corps) dans le détail que j'enregistre. Je pense atteindre cela au mieux par un traitement simple.
Les photographies illustrant notre entretien ont une autre caractéristique commune : elles ont toutes une qualité tridimensionnelle. Est-ce que cela est voulu ?Une des caractéristiques principales d'un corps est de présenter 3 dimensions, et j'essaie de prolonger cette perception du relief dans mon travail. Je suis attiré par les parties du corps sur lesquelles on ne s'arrête pas d'habitude : la plante des pieds, l'arrière des genoux, les côtes. En fait tout endroit où je trouve de la simplicité, des ombres subtiles et des courbes harmonieuses. Je m'inspire réellement plus de la sculpture que du travail des photographes. Peut-être parce qu'un grand nombre de photographes confondent une lumière intelligente et un fort contraste avec la profondeur ; ils s'enferment alors dans les 2 dimensions du tirage. Pour ma part, je suis persuadé que c'est toujours l'illusion de la profondeur qui donne sa force à une photographie.
Comment en êtes vous arrivé au nu ?Je le dois à mon intérêt pour un de vos compatriotes : Rodin. Pendant longtemps je n'ai fait que du paysage et des natures mortes : mais en dépit du fait que cela m'a aidé à me développer d'un point de vue technique, je dois reconnaître que les résultats étaient plutôt peu inspirants. Je sentais que je voulais travailler avec les gens mais mes premiers essais n'avait pas été très bons si bien que j'avais fini par me persuader qu'il me manquait ce qu'il faut pour faire de la bonne photo de personnages. Du coup je continuais à produire dans le confort et sans remise en cause mes paysages ennuyeux. Peu de temps après mon installation à Londres en 2006, j'ai visité une exposition Rodin à la Royal Academy of Arts. Rodin a changé ma vie. J'ai été profondément remué par son travail, et je me suis demandé s'il était même possible d'exprimer autant de force et de beauté avec un medium plus humble et à 2 dimensions seulement, comme la photographie. Quelques jours plus tard, je prenais un modèle et je commençais une nouvelle vie créative !
Pourquoi le choix de la chambre et celui du tirage platine / palladium ?La lenteur délibérée recquise par le travail en grand format convient bien à ma façon de travailler. La plupart du temps j'utilise une chambre portable 8x10, mais il m'arrive d'utiliser également une chambre 4x5, une 11x14 et à l'occasion une 10x12. Tous mes négatifs sont réalisés à la chambre, presqu'entièrement à la HP5, qui est un film fabuleux. Jock Surges prétend qu'utiliser une chambre est une façon de montrer aux gens que vous les respectez, et je suis d'accord avec lui. Mes modèles, qu'ils soient professionnels, amateurs, ou que ce soient juste des amis, réalisent qu'ils constitue une pièce d'un ensemble plus vaste quand je les photographie à la chambre, et cela influence énormément leur comportement. Je cherche des compositions qui puissent révéler des choses singulières sur les personnes avec lesquelles je travaille. Cela veut dire que j'explore leur corps avec elles pour trouver ce qui est intéressant, personnel et unique, et je crée une composition autour de cela. Le rythme lent du travail nous permet de développer une relation et permet aux modèles de se détendre, d'être eux-mêmes, et de révéler leur personnalité plutôt que d'exhiber une personnalité "pour l'appareil". Un de mes amis utilise le terme "entrevue" pour décrire les photographies que je réalise. Pour moi, ce mot veut dire qu'il y a une personne réelle dans l'image, plus qu'un objet anonyme. En fait, mes meilleures photographies montrent une personne qui a fait autant d'effort pour rendre la photographie heureuse que je n'en ai fait moi-même. L'outil que j'utilise rend cette collaboration possible. Je tire exclusivement en platine/palladium parce que c'est le seul medium qui me parle vraiment : il me permet de montrer le monde comme je le vois.
Des tonalités du platine et de celles du palladium, quelles sont vos préférées ? Toutes vous permettent-elles de transmettre vos émotions avec la même force ? Avez-vous une préférence ? Et pour le papier ?Ces temps-ci je tire sur du papier Buxton, un papier qui est fait à la main par Ruscombe, près de Margaux, en France. Le Buxton est un papier sensuel. Comme tous les produits naturels, il peut avoir son caractère par moment, et nombreux sont les gens qui n'aiment pas sa surface texturée. Mais j'adore ce papier. Je monte à sec le tirage fini sur une feuille plus large de Chateau Vellum (qui vient aussi du moulin de Ruscombe) et les deux papiers se complètent d'une manière formidable. Je fais faire spécialement des feuilles de Château Vellum de sorte que mes 8x10 puissent être montés sur un papier à 4 bords non coupés - un petit détail qui a son importance ! Je ne suis pas un grand fan des tirages pur platine ou pur palladium, c'est pourquoi je mélange les deux. Mon tirage idéal présente des ombres riches et neutres, et des hautes lumières plus chaudes. Le papier Buxton peut me permettre d'arriver à cette complexité tonale, parce qu'à l'inverse de nombreux papiers, il marche très bien avec le composant platine du tirage. Evidemment je sais bien que mon goût varie dans le temps... si vous me posez la question dans un an, je vous donnerai une réponse différente. Où le public peut-il voir votre travail ?Silverprint à Londres a exposé six de mes tirages jusqu'à fin avril, et j'espère trouver un espace convenable pour montrer le portfolio "Aperçus de Libby" plus tard cette année. . Bien entendu on peut toujours venir me voir directement à Londres aussi. Je présente des tirages sur mon site web (www.ianleake.com) et sur le site Contact Printers Guild (www.contactprintersguild.com).
dernière modification de cet article : 2008
|
||||||||||||||||||||||||||
|