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Henry Lewis

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Henry LEWIS / Radiographies

 

Henry Lewis photo
Radiograph 3 © 

 

Henry, qu'est-ce qui définirait le mieux votre travail photographique : diriez-vous que vous êtes un photographe du corps, de la perception, ou de la rétine ?

Eh bien je pourrais dire qu'au fil du temps tous ces aspects m'ont intéressé et ne peuvent pas vraiment être distingués de l'ensemble.

J'ai commencé par l'enveloppe avec la série body-art ; le corps, le torse et le visage servaient de support. J'espérais traiter de la juxtaposition entre le support et l'attirail qu'il portait pour la photo et puis de l'effet que les deux produisaient sur le spectateur.

Naturellement, le traitement était aussi diversifié que le public. L'élément de performance était important ; photographie de performance-performance de la photographie. Le corps et surtout le visage m'ont toujours captivé et j'ose dire presque tous les humains. Fondamentalement le visage est la première chose que l'on considère, par exemple chez le nouveau-né :
Notre attention est instinctivement attirée par cette grande forme ronde incorporant deux formes rondes plus petites pour les yeux et une en dessous, pour la bouche.

Sans surprise, le portrait a toujours été un sujet omniprésent dans l'art, du moins dans la plupart des civilisations. Avec l'attirance que les gens ont pour cette forme, la tête ou le torse sont devenus pour moi des outils très puissants. Tout ce qui est fait avec ce sujet peut prendre de l'importance et même lorsque le sujet est montré de manière neutre ou sans fioritures, les photographies qui en résultent continuent à véhiculer leur message silencieux.

Ces travaux sont le résultat de "l’ouverture de l’écluse". Ils permettent d'activer un flux de symbolismes inconscients dont le processus créatif s’inspire et développe des images et des formes. Ce processus ne peut être clarifié et doit rester mystérieux ou rêvé.                                                                                                                                                         

Le corps a été progressivement abandonné dans LVNA PROXIMA où le support a été remplacé par du papier, des dessins et des matériaux divers etc., devenant plus impersonnels et moins objectifs. Ici, la perception était mentale, par opposition à physique.

Plus tard dans une autre série intitulée Circles, il existe une association ou une interconnexion entre l'espace et le corps physique. La question est de savoir comment cet espace est perçu par l'œil de l'esprit. Il n'y a plus de sujet réel, je m'intéresse à savoir si le spectateur observe la photographie/le photogramme ou si l'œuvre regarde le spectateur. Cette notion revient souvent dans certaines de mes séries, encore récemment dans la série Burning.

Donc en réalité mon travail n'est pas la photographie du corps ou de la lune ou du ciel mais ce dont on prend conscience en regardant ces sujets dans les tirages.
 


Radiograph 4 © 


 
Quand a été réalisée cette série de radiographies ?


Le travail radiologique a commencé lorsque Christian Caujolle m'a présenté un étudiant en médecine en radiologie, Philippe Demange, à Arles vers 1985. A cette époque j'étais encore en train de finaliser les photographies corporelles et de commencer à travailler sur d'autres sujets. Philippe m'a poussé à faire de la photographie d'art aux rayons X. J'ai été intrigué et je l'ai rencontré un soir à Paris. Il m'a fait entrer clandestinement à l'hôpital de la Salpêtrière où nous avons fait quelques images d'essai.

Nous avons continué quelques fois dans d'autres hôpitaux. La chance de perfectionner la technique semblait insaisissable. Je ne savais pas vraiment ce que je voulais faire artistiquement avec cette technique.

Quelques années plus tard, j'ai rencontré le professeur Georges Salomon, professeur de neurologie à l'hôpital de la Timone et directeur des amis des musées de Marseille.

À l'époque, j'avais une exposition intitulée LVNA PROXIMA au Centre de la Vieille Charité et j'ai réussi à le convaincre de me prêter un laboratoire de radiologie inutilisé à l'Institut National de la Santé et de la Recherche médicale (INSERM) avec un fantastique ancien appareil à rayons X et une chambre noire. Kodak m'a donné quelques milliers de films 25x30cm. Alors là a vraiment commencé mon apprentissage de la radiographie.

J'ai également eu la chance d'avoir même accès à un technicien qui m'a vraiment aidé à élaborer une grande partie de la technique nécessaire. Il s'est avéré que la technique n'est pas si éloignée de la photographie visuelle à la lumière, mais il a fallu un certain temps pour en saisir les rudiments.

A l'époque j'habitais à 100km de Marseille ; je faisais un voyage chaque semaine et travaillais dans le laboratoire souterrain toute la journée. Cela a duré quelques années et j'ai pu créer un grand nombre de radiographies. Celles-ci ont été présentées dans divers supports comme des cadres lumineux à Marseille à travers une commande du Fonds national d'art contemporain avec Tom Drahos, Alain Fleisher et Pascal Kern à la Charité, mais aussi à Paris, Barcelone et au-delà.

 


Radiograph 5 © 


 
Diriez-vous que c'est l'aspect cosmologique de la technique radiographique qui vous attire ?

Je ne vois pas vraiment la cosmologie dans ma technique de  radiographie à moins qu'on parle de cosmologie fictive. Après avoir exploré les aspects spatiaux dans mes autres travaux déjà cités, j'en suis arrivé à la radiographie.

Avec la radiographie nous avons affaire à une bande invisible de rayonnement électromagnétique, semblable à la lumière visible. Cependant, contrairement à la lumière, les rayons X ont une énergie plus élevée et peuvent traverser la plupart des objets, y compris le corps. Toute la procédure se présente dans une pratique à l'envers par rapport à la photographie normale en ce sens que le sujet n'est pas regardé à travers un objectif par l'opérateur. Des rayons X sont envoyés à travers le sujet qui absorbe cette énergie, plus ou moins selon leur densité et une trace est exposée sur un film sensible derrière le sujet.

On peut imaginer cela comme une procédure comprenant ces trois parties : l'énergie des rayons X, le sujet et le film sensible. En photographie, on voit la trace plate d'un sujet en trois dimensions. En radiographie, je m'intéresse à la tridimensionnalité du champ d'exploration.

Le monde invisible au sein de cette bande très étroite est bien décrite par Philippe Piguet dans un texte sur notre série Là et par Là. Il y fait un parallèle avec un univers décrit dans Le Micromégas et aussi dans une référence aux « secrets microcosmiques de l'univers ». Naturellement, la nature des rayons X et de la radiographie est une porte ouverte pour travailler dans une bande d'espace spéciale et ce serait bien sûr une erreur de ne pas se concentrer là-dessus. Par conséquent, le terrain de jeu, bien que physiquement petit, est extrêmement vaste ; plus vous regardez, plus il y a à observer ou du moins à imaginer que vous observez.

 

henry lewis photo
Radiograph 6 © 


 
Quel est votre position par rapport au beau en art ?

Je ne pense pas à la beauté comme quelque-chose qu'on recherche consciemment de manière active en faisant de l'art. C'est un état d'esprit et elle peut apparaître ou non selon l'état d'esprit introspectif de chacun. Je pense qu'il y a un grand nombre de formes de beauté qui apparaissent dans l'art ; et ce qu'une personne perçoit comme beau peut être une horreur pour quelqu'un d'autre, il y a tellement d'exemples de cet état de fait évident.

En fait, une certaine forme de réception à la beauté peut se développer avec le temps ; en première approche, on peut être choqué par une œuvre d'art, et l'élément de beauté n'apparaît alors qu'une fois que la première étape des sentiments a été absorbée ou évaluée dans la  perception. Ainsi par exemple, des Désastres de la guerre de Goya ou du Radeau de la Méduse de Géricault. Personnellement, je pense que la beauté a naturellement sa place dans l'œuvre, au même titre que la laideur ou l'horreur et bien sûr toutes les nuances de gris entre les deux. Peut-être que la beauté n'existerait pas si son contraire n'existait pas. Dans la même mesure où la lumière a besoin de l'obscurité pour exister.


Henri Lewis au travail

 

 

dernière modification de cet article : 2021

 

 

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