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l'auteur

Jimmy Peguet 
Né en 1954, responsable d'un atelier de fabrication de cadres dans l'Indre. Photographe spécialisé en chambre grand format. Passionné de tirage platine par contact.
4 rue des Minimes, 36100 Issoudun. Tél 02.54.21.30.88
mail : peguet.jimmy(antispam)orange.fr

 

 

Le développement des plan-films par inspection

 

La manière habituelle et généralement utilisée pour développer les films en général et les plan-films en particulier est celle qui combine contrôle de la température et temps. Il existe une méthode alternative très intéressante et souvent méconnue, le développement par inspection : on va regarder l'image se former durant le développement, et lorsqu'on jugera que celui-ci a atteint le point souhaité, on retirera le film du révélateur pour le passer comme on le fait habituellement dans le bain d'arrêt, puis dans le fixateur. Je pratique couramment cette méthode avec des révélateurs au pyrogallol, mais on peut bien entendu l'utiliser avec d'autres révélateurs. Voir l'image apparaître sur le négatif est un plaisir dont on ne se lasse pas.

Le développement des plan-films se fait classiquement en cuvette. On utilise une lampe de laboratoire avec une ampoule de 15 watts, et généralement un écran vert foncé. Vert foncé parce que les films panchromatiques sont généralement moins sensibles à cette couleur, mais également parce que le vert est la couleur à laquelle l'œil est le plus sensible. La lumière émise par une lampe de 15 watts est très faible au travers de cet écran, et n'est réellement utilisable que parce que l'œil devient très affûté après plusieurs minutes passées dans le noir complet. L'écran peut être un Kodak Wratten n° 3, j'utilise personnellement un écran Ilford 20x25 n° 908. Il faut généralement commander ces filtres, qu'on trouve rarement en stock dans le commerce. On va placer cet écran à environ 1 mètre de la cuvette de révélateur, pas trop haut pour que le produit ne coule pas le long des bras si on lève ceux-ci.

Rappel : si l'exposition à la prise de vue contrôle les ombres (les parties claires du négatif), le développement contrôle principalement les lumières (les parties sombres du négatif). Le principe est très simple : on va développer comme on le fait habituellement dans le noir durant les ¾ du temps estimé. A ce moment, on va allumer brièvement la lampe pour juger rapidement de l'état du développement en regardant où en sont les hautes lumières (les parties noires sur le négatif), puis on va éteindre et continuer le développement jusqu'au point désiré, en contrôlant encore par la suite si nécessaire. Allumer trop tôt risquerait de voiler le film, et est de plus en général inutile.

Que doit-on chercher à voir ? On cherche les hautes lumières, les zones VIII et au-dessus, qui vont apparaître comme des taches foncées sur le négatif, la zone VII étant souvent clairement distincte également, alors qu'on ne voit pas les ombres. Le processus est totalement visuel et demande de la pratique pour juger du degré de noir qu'on doit rechercher pour éviter le sur ou le sous-développement. Il est bon de s'entraîner avec un négatif dont on connaît déjà le temps de développement, et qui comporte des plages importantes et clairement délimitées de hautes lumières. Avec un tel négatif, la technique est très simple et s'apprend rapidement. Les choses deviennent nettement plus difficiles avec une image comportant de petites plages de lumières disséminées, et le sont encore davantage si le négatif est peu contrasté et demande à être poussé. Nous y reviendrons plus loin.

Comment regarde-t-on ? On regarde toujours sur la base du film. Si on regarde côté émulsion, on voit clairement le sujet, mais il est difficile de juger, l'image étant très sombre, on a l'impression d'être allé trop loin alors qu'on est encore très loin du compte. Le film est très clair, laiteux côté support, on ne discerne presque rien, mais on commence à voir se détacher les masses sombres des lumières : c'est sur ce côté qu'on juge. On regarde l'image en lumière réfléchie, à un mètre environ de la lampe. Inutile de s'affoler, regarder calmement, d'abord côté émulsion pour bien repérer ou se remémorer le sujet, puis côté support pour juger de l'état du développement. Il ne faut bien entendu pas exagérer le temps où on garde la lumière allumée, ni s'affoler au début, le film supporte plusieurs expositions brèves à la lumière avant de voiler.

Comme écrit plus haut, un sujet peu contrasté va être difficile à juger de cette façon, car on aura du mal à discerner quelque chose sur le film. Dans ce cas, on va regarder par transparence face à la lumière, en mettant un doigt derrière le film : la silhouette de ce doigt va apparaître complètement noire, et va servir de repère : les hautes lumières devront être moins sombres que le doigt. Ceci demande une bonne expérience. Si la lampe n'est pas placée trop haut, le révélateur ne coulera pas le long des bras.

Il est bon, afin de garder les mains libres, d'avoir l'interrupteur de la lampe au pied. J'ai une pédale qui allume lorsqu'on appuie, et coupe dès qu'on relâche la pression : pas de risque d'oublier ou de laisser allumée trop longtemps la lampe.

Le développement par inspection demande un peu plus de manipulation qu'un développement classique : attention donc aux traces de doigts et aux manipulations trop nerveuses qui pourraient laisser des traces. Si vous développez déjà en cuvettes, vous n'aurez aucun souci.

Une remarque sur les révélateurs : ceux à base de pyrogallol ou de pyrocatéchine sont bien adaptés à cette méthode, le film se désensibilisant au fur et à mesure du développement.

Cette méthode a de nombreux avantages.

-        Elle s'apprend rapidement.

-        Elle peut permettre de déterminer rapidement le temps pour un film qu'on ne connaît pas.

-        Elle permet de rattraper des films dont on n'est pas certain (si, comme dit l'autre, vous êtes celui ou celle qui ne rate jamais son coup, qui sait toujours où il va, dont la cellule est parfaite, qui maîtrise à la perfection sa mesure et dont l'obturateur fonctionne toujours précisément, ceci n'est pas fait pour vous. Moi, je me plante régulièrement).

-        Elle permet de développer en même temps des films qui demandent des temps de développement différents. Dans ce cas, il suffit de stocker les premiers développés dans le bain d'arrêt, en agitant de temps à autre pour attendre les suivants. Encore que par commodité, je préfère organiser mes négatifs pour traiter en même temps ceux qui demandent à peu près le même temps.

-        Elle rend indépendant de la température de la pièce et des bains : plus de mise à température des produits, de bain-marie, particulièrement mal pratique avec de grandes cuvettes, ou de jonglage avec des abaques de correction plus ou moins précises.

Les premières fois où j'ai entendu parler de cette méthode, j'ai pensé que c'était encore un truc ésotérique pour ceux qui voulaient faire les intéressants et se singulariser. En y réfléchissant, j'ai commencé à me rendre compte qu'elle allait dans un sens qui me convenait parfaitement, en rendant les choses très simples, et en libérant de la technique. Comme toutes les méthodes, il est bon de l'appliquer judicieusement, de mélanger peut-être la méthode conventionnelle avec celle-ci. Certains auront besoin pour photographier de repères techniques pointus, de courbes, de sensitométrie, etc., d'autres seront plus à l'aise avec des manières de faire moins techniciennes : si vous faites partie de cette catégorie, il vaut le coup d'essayer le développement par inspection. J'ai beaucoup de mal aujourd'hui à ne pas au moins jeter un œil vers la fin du développement.

 

L'article de référence (en anglais) : http://www.michaelandpaula.com, puis "Writings", puis "Development by inspection". Le forum "Azo" du site contient également des informations intéressantes.

Un autre article en anglais par Ed Buffaloe : http://unblinkingeye.com/Articles/
Inspection/inspection.html

 

 

dernière modification de cet article : 2003

 

 

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